Se réunit une fois par mois environ autour d'un livre ou d'un auteur. Soirées à thème, sorties, invitation d'auteurs...

lundi 11 janvier 2016

9 février 2016

« Peu importait le fond pour Guylain. Seul l'acte de lire revêtait de l'importance à ses yeux. Il débitait les textes avec une même application acharnée. Et à chaque fois, la magie opérait. Les mots en quittant ses lèvres emportaient avec eux un peu de cet écœurement qui l'étouffait à l'approche de l'usine.»  
Guylain, le héros du livre, est ouvrier dans une usine de traitement et de recyclage de papier. Il abhorre son métier et cette machine, "la chose", sur laquelle il travaille tous les jours. Gloutonne, abjecte, elle avale, pilonne et broie des tonnes de livres pour obtenir une mélasse nauséabonde qui servira à refabriquer du papier.  "la chose était une absurdité qui mangeait avec une gloutonnerie abjecte sa propre merde". Elle est aussi très dangereuse. Elle a broyé les jambes de Guiseppe, l'ancien opérateur en chef, l'ami de Guylain.
Guylain récupère tous les jours, à l’insu de son chef et des caméras de surveillance, des feuilles de papier restées intactes, coincées entre les couteaux broyeurs. Il en fait la lecture, tous les matins, dans le RER de 6h27 qui le mène au travail, aux autres usagers du train , public attentif et fidèle pendant toute la durée du trajet.
Guylain soutient également son ami Guiseppe, anéanti suite à son accident du travail le 16 avril 2002. La "chose" a  broyé les jambes de son ami et les a monstrueusement compactés dans la pâte à papier estampillée sous les n° 67455 et 56 comme si de rien n'était. Guiseppe n'a plus qu'une idée en tête, récupérer tous les livres qui ont été fabriqués avec "cette pâte" lui donnant l'impression de récupérer ses jambes. Macabre consolation! Avec l'aide d'un ami bouquiniste, Guylain récupère tous ces livres, et use d'un stratagème pour que son copain garde toujours l'espoir de vivre, en les lui ramenant au compte-goutte.
Yvon, gardien à l'entrée de l'usine, passionné de théâtre et de poésie, est un collègue et ami de Guylain. Invités à la maison de retraite par des mamies usagères du 6h27, Ils vont ensemble lire et réciter des textes et poèmes apportant un peu de joie et de fantaisie à ces personnes âgées.
Un matin, Guylain trouve par terre dans le train, une clé USB. Celle-ci comporte 72 textes, "miettes de vie" d'une jeune femme anonyme  qui retranscrit tous les jours sur son ordinateur, après son travail, ses états d'âme, ses journées, sa vie.  Comme pour les "élues du jour", 'les peaux vives" ,  il lira aux usagers du 6h27 ces textes si personnels. Avec l'aide de Giuseppe, Guylain retrouve la propriétaire de la clé. Elle est jeune, belle, et dame-pipi dans les toilettes d'un grand centre commercial. Guylain lui renvoie sa clé USB, accompagnée de quelques explications, d'un grand bouquet de fleurs  et de son numéro de téléphone.... Elle l’appellera.

Commentaire:
Ce roman est une ballade, une ode, un hymne à la gentillesse et à l'amitié entre des petites gens qui grâce à Guylain retrouvent une joie de vivre et des moments de bonheur. Le contraste est un effet de style qui va bien au roman. La laideur de l'usine, de la broyeuse gloutonne et abjecte qui vomit une mélasse de papier nauséabonde, se transforme au fil des pages en lumière, en joie pour les auditeurs du liseur, Guylain, puis en beauté et fantaisie grâce à une jeune femme de basse condition sociale,  une "dame-pipi" qui devient la princesse de Guylain. La magie de l'écriture !

Marie-Claude C